Wednesday, July 04, 2007

Face à la sécheresse, une meilleure gestion de l'eau s'impose

L'humanité sera confrontée à l'avenir à des sécheresses plus fréquentes, plus longues et plus sévères. Or, les populations et les autorités concernées n'y sont pas préparées, ou très mal, à tel point qu'elles connaissent déjà de grandes difficultés à faire face aux pénuries actuelles. Une meilleure anticipation et une gestion plus rationnelle des ressources en eau permettraient pourtant d'en limiter les impacts.

Tels sont les principaux constats livrés par les participants au premier Forum international sur la sécheresse, qui s'est achevé mercredi 20 juin à Séville. Le Forum, qui rassemblait des gestionnaires de l'eau venus du monde entier, était organisé par le ministère espagnol de l'environnement, la région Andalousie, et l'exposition universelle de Saragosse, qui aura lieu, en 2008, autour du thème de l'eau.

L'Espagne, régulièrement touchée par des pénuries, visait plusieurs objectifs en organisant cette rencontre : démontrer l'importance politique accordée au sujet ; mettre en valeur les progrès accomplis récemment et tenter de se poser en référence. "Pendant longtemps, nous pensions pouvoir prélever de l'eau sans aucune limite, et nous allions droit à la catastrophe, a expliqué Joan Corominas, le président de l'Agence de l'eau andalouse. Pendant la grande sécheresse des années 1990, nous avons vécu une véritable psychose : nous avons même envisagé d'évacuer les régions touchées. Nous avons été forcés de reconsidérer toutes les facettes de notre politique de l'eau."

Pour faire face, toutes les régions du monde n'en sont pas au même point. Les pays riches disposent d'infrastructures (barrages, retenues, canaux, etc.) qui leur permettent de mieux gérer le manque de pluies. "Il y a deux mondes, résume Jaime Palop, directeur de l'eau au ministère espagnol de l'environnement. Le nôtre, dans lequel le manque d'eau réduit la qualité de vie et entame la compétitivité économique ; et le monde en développement, où, quand les pluies cessent, les populations meurent de faim."

Malgré ce décalage entre pays riches et pauvres, tous devront faire face à des défis communs. "Dans la région du lac Tchad, à cause du manque d'eau, les sols et les rives du lac s'érodent, la productivité des sols décline, explique Sani Adamu, de la commission de gestion du bassin du lac Tchad. Les conflits pour l'accès à l'eau se multiplient, la pauvreté augmente."


"UNE ZONE D'INCERTITUDE"

L'humanité entre "dans une zone d'incertitude où les solutions du passé ne fonctionneront plus", indique Paul Reiter, directeur de l'Association internationale de l'eau. Les sociétés devront se tourner vers de nouvelles sources d'approvisionnement, comme le recyclage et le dessalement de l'eau de mer, mais d'abord économiser et améliorer une gestion de l'eau trop souvent anarchique, ont martelé les experts présents à Séville.

Quelques principes de base peuvent s'appliquer partout. Tout d'abord, connaître le fonctionnement du milieu naturel. Ensuite, protéger sa survie. "Nous avons progressé, a affirmé Cate Brown, du Centre de recherche sur l'eau d'Afrique du Sud. En dix ans, nous sommes passés d'un débat sur la nécessité de préserver un débit minimal dans le lit des rivières à un débat sur le volume de ce débit."

Autre impératif : arbitrer les priorités entre usagers et, si nécessaire, redéfinir les droits d'accès à l'eau entre urbains, ruraux, industriels et producteurs d'électricité, ce qui suppose de revenir sur des situations acquises. En moyenne, l'agriculture consomme 70 % de l'eau douce. Les marges de manoeuvre y sont donc importantes. "Pour inciter aux économies, il faut impérativement modifier le prix de l'eau, afin de refléter sa véritable valeur, et cesser de subventionner la culture de coton ou de riz dans des régions arides", affirme Larry Farwell, spécialisé dans la gestion de l'eau en Californie.

"En matière de partage de l'eau, il faut fixer des règles durables, claires et consensuelles, résume Salem Marzoug, de l'organisation de gestion du fleuve Sénégal. Tout doit être basé sur l'équité, afin que chacun ne mesure pas seulement les sacrifices qu'il consent, mais les bénéfices qu'il en tire."

L'application de restrictions en période de sécheresse peut aussi s'avérer délicate. Selon Stuart White, professeur à l'université de Sydney, ces périodes, traumatisantes pour les populations, doivent permettre de remettre en question les situations acquises et de définir de nouvelles règles de gestion de l'eau, afin de limiter les conflits à venir.


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